Un des plus grands mythes de notre temps, c’est que le sexe va sans dire.
On pense qu’un jour on pourra s’attraper sur un canapé, youpla, avec n’importe qui, sous n’importe quel angle et dans n’importe quelles circonstances et que ça sera bien. Bon. Après tout, puisque le sexe est censé être une telle rigolade à tous les coups sans faiblir, pourquoi pas? Nos camarades homosexuels ont apparemment bien compris cette maxime. C’est à se demander ce qui nous retient, nous pauvres attardéEs hétérosexuelLEs.
Je voudrais prendre un point de vue féminin et hétérosexuel (le mien) pour discuter de la question.
Lorsqu’un jour les adultes nous expliquent le sexe, il y a de fortes chances pour que nous ayons droit à une version hétérosexuelle et exclusivement pro-conceptrice. Il faut dire à leur décharge que souvent nous ne demandons pas ce qu’est le sexe, mais « d’où viennent les bébés ? ». De cette confusion initiale ressort l’idée que le truc du monsieur doit aller dans celui de la dame. Le missionnaire est suggéré.
La définition du sexe qui nous est alors donnée est la pénétration. Ceci est très important.
Le concept de plaisir est à peine abordé. On sait que le garçon doit éjaculer (pour procréer et terminer la séance). Donc forcément il doit jouir (bien que les textes tantriques nous apprennent, messieurs, qu’éjaculation et jouissance ne sont pas liés).
Quand aux filles, c’est plus nébuleux - laissé à la discrétion de chacunE.
Tout cela marche plus ou moins bien. De nombreuses femmes se demandent en silence pourquoi elles sont frigides - mais pourquoi ne le seraient-elles pas? Elles font rarement part à leurs compagnons de leur ‘déficience‘, préférant le flatter pour détourner l’attention de leur ‘problème‘. On sait ce que notre société pense d’une ‘femme mal baisée’[1].
Une certaine insatisfaction grandit, ou alors tout simplement l’intérêt sexuel recule, diminue, disparaît et on se consacre à d’autres hobbies.
D’après cette première explication du sexe, la confusion grandit lorsqu’il s’agit de comprendre les moeurs homosexuelles. Avec les garçons, on peut vaguement suivre; la pénétration est toujours possible, mais l’ouverture des possibilités et combinaisons (entraînant souvent une communication pointue pour des préférences spécifiques) peut sembler troublante. Il faut communiquer!
Quand aux filles, la perplexité est totale. « Mais que font-elles au lit? » semble être la question qui brûle les lèvres de tout hétéro face à une lesbienne. En général, l’hétéro conclut que la lesbienne dépense une fortune en godes japonais. La lesbienne à qui on pose une énième fois la question lève la main et agite les doigts d’un air las ou exaspéré. L’hétérosexuel ne comprend toujours pas et pense que les lesbiennes ont une vie sexuelle de poisson rouge, ce qu’il trouve dommage si la lesbienne ne ressemble pas a une camionneuse.
…La lesbienne, voyez-vous, a opéré un tout petit glissement de définition. Elle ne définit pas le sexe par la pénétration, mais par l’orgasme et le plaisir. C’est un concept plus révolutionnaire qu’il n’y parait. Si nous définissions tous le sexe ainsi, je pense que nous pourrions un jour atteindre la paix sur terre.
Alors, pour revenir aux conséquences de mythes corollaires, je vais m’énerver un peu, parce qu’il y en a 2 que je ne veux PLUS JAMAIS ENTENDRE.
Mythe #1: «Elle est vaginienne ou clitoridienne?»
JE NE VEUX PLUS JAMAIS ENTENDRE CETTE CONNERIE. C’est une théorie de Freud, qui déclare le premier comportement adulte et le second immature et infantile. Freud ne devrait sans doute pas être la référence en matière d’orgasme féminin n‘ayant pas dit que des choses intelligentes à ce sujet et ne disposant pas du matériel d’étude adéquat.
Jugement de valeur
Cependant, au détour d’un magasine, d’un livre ou d’un film, il m’arrive de retomber sur cette question qui me fait irrésistiblement penser aux voitures; diesel ou essence? Toit ouvrant ou décapotable? 3 ou 5 portes?
Il est l’heure de passer à autre chose et de faire passer pour des imbéciles les mecs qui prennent le con pour une mécanique automobile à 2 vitesses, et le point G pour le starter.
TOUS LES ORGASMES viennent du clitoris. C’est la que sont situées toutes les terminaisons nerveuses. Seuls les 5 premiers centimètres du vagin ont des terminaisons nerveuses[2]. Par ailleurs, le clitoris en possède 8000 (pour la petite histoire, les mecs en ont 4000) et est le seul organe humain chez l’humain dont l’unique fonction soit le plaisir.
Un mec qui fait le fier parce que sa femme est soi-disant vaginienne me donne envie de la baffer.
Mythe # 2. «Elle est frigide».
Bon, alors la, même chose. 98% des femmes se masturbent et jouissent, youpi! Mais parce qu’on leur a fait croire que le clitoris ne comptait pas (voir ci-dessus), elle rêvent du Prince Charmant qui leur apportera de ‘vrais orgasmes’ et leur fera crever le plafond. Un jour. Elles peuvent attendre. De nombreuses femmes se croient frigides parce qu’elles ne jouissent pas avec leur partenaire. Ou aucun partenaire. Mais elles jouissent, et très rapidement, par elles-mêmes. Et tant qu’elles ignoreront ces orgasmes-ci pour tendre à ces orgasmes-là en pensant qu‘ils n‘ont rien à voir, elles ne les auront pas. L‘un entraîne l‘autre. Et un tien vaut mieux que 2 tu l’auras.
C’est là qu’entre en scène une femme qui devrait être vénérée de la Nouvelle-Guinée à Seattle en passant par la Tunisie et Taiwan, bref, partout, partout, partout. Shere Hite est une chercheuse néo-zélandaise qui a pris la question de la jouissance féminine de manière scientifique et à l’endroit. Il faut dire que rien sur ce sujet n’était scientifique avant elle, mais que les rumeurs passaient par vagues, inspirées par l’église catholique, qui est encore moins bien placée pour parler du sujet que Sigmund Freud, avec ses armées de prélats castres.
Bref, Shere Hite, déesse plutonienne, s’est demandé comment les femmes jouissaient, a rédigé un questionnaire, a reçu des milliers de réponses. Elle a compilé très sérieusement les chiffres et les méthodes. Il en ressort que si 98% des femmes se masturbent et jouissent, seules 30% d’entre elles parviennent a jouir lors de rapports sexuels ‘normaux’, vous l’aurez devine, par pénétration. En revanche les descriptions de techniques ne manquent pas, et vont des femmes qui utilisent de l’eau à une certaine température, celles qui se masturbent sur le dos, sur le ventre ou le côté, avec les mains, des objets, des polochons. Environ 2% insèrent des objets dans leur vagin. (Un vibromasseur on vous dit, pas un gode! Le clitoris, par une certaine ironie de la nature se trouve 5 cm au-dessus de l’entrée du vagin et peut souffrir de sous stimulation.)
Donc la définition du sexe ‘normal’ n’est pas particulièrement porteuse de plaisir pour les femmes.
D’après le questionnaire, le plus grand facteur de plaisir pour les femmes dans le sexe à 2 était le toucher, non de manière localisée par l’orgasme, mais par tout le corps. Quand elles ne jouissent pas mais vous disent que c’était vraiment vraiment bien, vous pouvez les croire aussi - si vous avez entre vous une politique d’honnêteté.
Donc, la méthode ‘habituelle’ n’est habituelle que parce que l’homme a déterminé les règles du rapport sexuel ces 25 derniers siècles. Je signale au passage que ceci n’est pas une attaque contre l’homme d’aujourd’hui, mais bien contre le legs sexiste dont nous avons tous hérité.
Ce qui est bon pour l’homme ne l’est pas forcément pour la femme, et vice versa. Un principe d’alternance devient alors tout a fait pertinent. Hors procréation, rien n’est particulièrement ‘normal’ ou ‘anormal’. Un couple ne songe pas à procréer 99.9% des fois ou ils font l’amour (hormis Christine Boutin). Nous sommes libres d’explorer nos envies et désirs, et surtout de ne pas s’entendre dire qu’on est bizarre de ne pas jouir des qu’il appuie sur le joystick, comme son ex (la pauvre).
[1] Une contractuelle, par exemple, est une femme mal baisée
[2] The vagina; women do not need anesthesia in the vagina during surgery.
“Like nearly all other internal body structures, it is poorly supplied with end organs of touch. The internal entodermal origin of the lining of the vagina makes it similar in this respect to the rectum and other parts of the digestive tract.”
Kinsey, Sexual Behavior in the Human Female
Excellentes remarques! Tout le monde devrait lire ce post qui, selon moi, rappelle pourquoi la sexualité ne devrait pas voire même ne peut pas se réduire à un simple coit!
RépondreSupprimerCependant, je ne pense pas que l'orgasme vaginal soit totalement un mythe. Dire que seul le clitoris peut donner du plaisir est aussi réducteur et peut froisser des filles comme moi qui ne connaissent le plaisir à 2 que par orgasme "vaginal". Quand j'entends des filles dire qu'elles atteignent l'orgasme "clitoridien" très facilement et l'orgasme "vaginal" presque jamais, je suis très intriguée. Mais là où je suis carrément blessée, c'est quand je lis que de toutes facons seul le clitoris procure du plaisir! Connaissant bien les 2 sensations, je me questionne! Alors pendant le rapport, les sensations fortes au vagin ne sont pas de véritables orgasmes parce que le clitoris reste petit et "prostré"?! Jusqu'à quand allons nous remettre en cause notre plaisir?
Bref ne tombons pas dans l'extrême inverse et respectons aussi celles qui ne ressentent aucun plaisir au clitoris pendant le coit mais s'éclatent avec leur vagin! ;)
J'ai un scoop pour vous les filles : les hommes aussi peuvent avoir un orgasme vaginal !! il existe un point juste en dessous de l'attache des testicules (ce qui correspond, sur l'anatomie féminine, à l'entrée du vagin) qui peut être stimulé pour obtenir un orgasme moins intense et plus long, mais faut vraiment y aller longtemps et franco (je tuerais pour trouver sur cette planète un autre homme qui connait cette autre technique !!)
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